Aujourd'hui, Javier Colina, le maître de la contrebasse Flamenco Jazz (1960-)

Javier Colina, né le 2 décembre 1960 à Pampelune, Espagne , est une figure incontournable de la contrebasse européenne. Autodidacte sur l'instrument (après avoir débuté par le piano et l'accordéon), Colina a réalisé l'exploit d'imposer la contrebasse dans le flamenco, un genre musical qui, traditionnellement, ne comporte pas de registre grave instrumental.   

Sa carrière est marquée par le dialogue interculturel. Il a collaboré avec des légendes du flamenco comme Tomatito et Enrique Morente, mais c'est son travail sur l'album "Lágrimas Negras" (2003) avec le pianiste cubain Bebo Valdés et le chanteur Diego "El Cigala" qui lui a valu une reconnaissance mondiale. Cet album, produit par Fernando Trueba, fusionne les rythmes du boléro cubain avec la passion vocale du flamenco, le tout soutenu par les lignes de basse boisées et profondes de Colina.   

L'apport de Javier Colina à la technique de la contrebasse est considérable, car il a dû inventer un vocabulaire pour insérer l'instrument dans des structures rythmiques (compás) qui n'étaient pas conçues pour lui.

L'Adaptation du "Rasgueado"

En flamenco, la guitare assure à la fois l'harmonie et la percussion. Colina a développé un jeu de pizzicato extrêmement percussif, utilisant la touche de la contrebasse pour faire claquer les cordes, imitant ainsi les talons des danseurs (zapateado) ou les percussions de la guitare. Il parvient à créer une assise rythmique qui respire comme le flamenco, évitant la rigidité du jazz swing traditionnel.   

La Fusion Cubaine

Sur Lágrimas Negras, Colina déploie sa maîtrise du Tumbao, le motif de basse syncopé typique de la musique afro-cubaine (où la basse évite le premier temps de la mesure). Son génie est de jouer ce Tumbao avec une souplesse (rubato) qui permet au chanteur flamenco de phraser librement, créant un hybride rythmique unique au monde.   

À l'opposé des murs d'amplis de Wolstenholme ou Savage, Colina est un puriste de l'acoustique.

• L'Instrument : Il joue sur une contrebasse acoustique traditionnelle, privilégiant la captation par microphone en studio pour restituer le "bois" et l'air de l'instrument.

• Les Cordes : Il utilise des cordes à tension modérée, ce qui facilite l'exécution des ornements rapides et des glissandos typiques du phrasé flamenco et arabe.