Au panthéon du hard rock mélodique des années 1980, le groupe suédois Europe occupe une place de choix, principalement grâce à son hymne planétaire "The Final Countdown". Si les visages du chanteur Joey Tempest et du guitariste John Norum sont souvent les premiers à venir à l'esprit, la fondation rythmique du groupe repose depuis presque ses débuts sur un homme plus discret, mais tout aussi essentiel : le bassiste John Levén.
Né John Gunnar Levén à Stockholm, il grandit dans la banlieue d'Upplands Väsby, véritable berceau de la scène rock suédoise où il côtoie ceux qui deviendront ses futurs partenaires musicaux. À l'origine guitariste, il se tourne vers la basse et rejoint la première mouture d'Europe (alors appelée Force) en 1981. Fait amusant de l'histoire du groupe : il échange brièvement sa place avec le bassiste de Yngwie Malmsteen, Marcel Jacob, avant de réintégrer définitivement Europe juste avant l'enregistrement de leur premier album éponyme en 1983.
Dès ce premier opus, le style de Levén est en place. Il n'est pas un bassiste démonstratif ou adepte des solos techniques à la manière de certains de ses contemporains. Son approche est celle du "song-first" : une maîtrise du tempo, des lignes de basse solides comme le roc et un sens aigu de la mélodie qui soutient les compositions sans jamais les surcharger. Il privilégie le jeu aux doigts, apportant une rondeur et une chaleur à son son qui contraste parfaitement avec les guitares saturées et les claviers flamboyants.
En 1986, le monde change pour Europe avec la sortie de l'album The Final Countdown. Si la célèbre mélodie au synthétiseur est l'œuvre de Joey Tempest, la légende veut que ce soit John Levén qui ait poussé le chanteur à exhumer ce vieux riff de ses tiroirs pour en faire une chanson complète. Le résultat est l'un des singles les plus vendus de tous les temps. Sur cet album et le suivant, Out of This World (1988), le jeu de Levén est un modèle d'efficacité. Il verrouille le tempo avec le batteur Ian Haugland, créant une section rythmique puissante qui permet aux hymnes du groupe ("Carrie", "Rock the Night", "Superstitious") de prendre leur envol.
Lorsque Europe décide de faire une pause en 1992, après l'album Prisoners in Paradise qui explorait un son plus "roots", Levén reste actif. Il démontre sa polyvalence en participant à de nombreux projets. On le retrouve aux côtés de musiciens renommés comme Glenn Hughes (ex-Deep Purple/Black Sabbath), ou au sein de groupes tels que Brazen Abbot (avec Joe Lynn Turner) et Last Autumn's Dream. Il collabore également avec son ancien complice d'Europe, John Norum, sur ses albums solo.
La reformation tant attendue d'Europe a lieu en 2003. Depuis l'album Start from the Dark (2004), le groupe a entamé une seconde carrière impressionnante, délaissant le son policé des années 80 pour un hard rock plus organique, bluesy et sombre, puisant ses influences chez Deep Purple, Led Zeppelin ou Black Sabbath. Dans cette nouvelle configuration, le jeu de John Levén a gagné en profondeur et en groove. Son entente avec Ian Haugland est quasi télépathique, et son son de basse, souvent plus saturé et présent dans le mix, est devenu une composante essentielle de la nouvelle identité du groupe.
Fait remarquable, John Levén, tout comme Joey Tempest, est le seul membre à avoir joué sur absolument tous les albums studio d'Europe. Cette constance en fait un véritable pilier, le gardien de la cohésion rythmique du groupe à travers les décennies, les changements de modes et les évolutions stylistiques.
Marié et père de trois garçons, John Levén reste cette force tranquille sur le côté de la scène, concentré sur son instrument, fournissant imperturbablement le pouls qui fait vivre la musique d'Europe. En ce jour anniversaire, on célèbre un musicien dont la fiabilité et le goût musical ont contribué à écrire certaines des plus grandes pages du rock mélodique.
Ajouter un commentaire
Commentaires