Aujourd'hui, Reuben Rogers, la basse des Caraïbes né en 1974

Publié le 15 novembre 2025 à 07:45

Né le 15 novembre 1974 à St. Thomas, dans les Îles Vierges américaines , Reuben Renwick Rogers est l'une des forces les plus vitales de la contrebasse dans le jazz moderne. Sa contribution va bien au-delà de la simple maîtrise technique ; il apporte un son, une pulsation et un esprit qui lui sont propres. Comme le décrivent ses pairs, il est "imprégné de groove et d'esprit depuis sa naissance".   

La "chimie unique"  du style de Rogers provient d'une fusion innée d'influences qui définissent son éducation. D'abord, le gospel : ses parents étant pasteurs, il a grandi en jouant à l'église. Ensuite, les rythmes caribéens : il a absorbé les "sons sismiques" et les lignes de basse omniprésentes du "calypso et du reggae" qui saturaient l'air de son île natale.   

Lorsque Rogers a découvert le jazz à l'adolescence, ce nouveau langage a ajouté "la liberté et l'improvisation" à ces qualités rythmiques innées. Le résultat n'est pas un bassiste de jazz qui cite des rythmes caribéens ; c'est un musicien caribéen qui parle couramment le jazz. Son groove n'est pas seulement le "swing" académique, c'est une pulsation "solaire" et terrestre. La preuve de cet ancrage est sa bibliothèque de samples pour d'autres musiciens, "Upright Bass Vol 1", qui se concentre spécifiquement sur le reggae, le calypso, le dub et le soca.   

Formé au prestigieux Berklee College of Music , Rogers a commencé sa carrière professionnelle à l'âge fulgurant de 17 ans, en tournée avec le trio de Marcus Roberts. Depuis lors, il est devenu le bassiste "le plus demandé"  de sa génération, ce qui lui vaut le surnom affectueux de "Super-Sideman".   

Sa discographie, qui compte plus de 100 enregistrements , est un véritable "who's who" du jazz moderne : Charles Lloyd, Joshua Redman, Wynton Marsalis, Roy Hargrove, Dianne Reeves, Nicholas Payton, et Mulgrew Miller.   

Ce qui distingue la carrière de Rogers en tant que sideman, c'est la longévité de ses collaborations. À l'instar de Neil Swainson avec George Shearing, Rogers entretient des partenariats profonds. Mais au lieu d'une seule collaboration exclusive, Rogers gère plusieurs mandats à long terme simultanément, notamment avec Joshua Redman, Charles Lloyd et le trio d'Aaron Goldberg, avec qui il joue depuis plus d'une décennie. Cela démontre une polyvalence et une adaptabilité extraordinaires, capable de fournir son groove unique tout en servant la vision de multiples leaders.   

Deux projets illustrent parfaitement la voix personnelle de Rogers. Le premier est le "21st Century Band", un groupe aux influences afro-caribéennes qu'il co-dirige avec ses mentors et compatriotes des Îles Vierges, le saxophoniste Ron Blake et le batteur Dion Parson. C'est avec eux qu'il a été initié au jazz. Ce groupe représente un "cercle complet"  : après avoir passé des décennies à adapter son groove caribéen au jazz moderne, il utilise désormais sa maîtrise du jazz pour l'appliquer en retour à ses racines afro-caribéennes.   

Le second est son unique album en tant que leader, The Things I Am, sorti en 2006. Il s'agit d'une session "all-star"  qui réunit les musiciens qui définissent sa carrière : Joshua Redman, Nicholas Payton, Aaron Goldberg et Ron Blake. Le fait que cet album de 2006 reste son seul effort de leader à ce jour est révélateur. Cela suggère que Reuben Rogers, tout en étant un compositeur accompli, trouve sa plus grande expression personnelle non pas dans le leadership, mais dans la conversation et la collaboration. Il est, par choix et par tempérament, l'incarnation ultime du "Super-Sideman".  

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