Eko JB-100 3/4, la Jazz Bass Short scale Italienne

L'histoire de la marque EKO est un récit fascinant d'innovation, de succès fulgurant, de défis économiques et d'une renaissance sur la scène mondiale. Fondée à l'apogée du mouvement musical "Beat", EKO a su, en l'espace de quelques années, s'imposer comme un acteur majeur, non seulement en Italie mais aussi à l'échelle internationale. Son héritage, profondément lié à l'esprit d'accessibilité et de production de masse de qualité, a marqué des générations de musiciens. Le présent rapport se propose d'explorer ce parcours historique riche et complexe. Dans une seconde partie, l'analyse se concentrera sur l'un des instruments contemporains de la marque, la basse EKO JB 100 3/4 Sunburst, afin de déterminer comment les principes fondateurs de l'entreprise s'expriment à travers ses créations modernes. L'objectif est de fournir une compréhension approfondie de cet instrument, en détaillant ses spécifications, en évaluant son adéquation à son public cible et en le comparant aux alternatives du marché, tout en le replaçant dans le contexte de l'évolution de la marque EKO.

Les Racines d'un Empire et l'Âge d'Or (1959-1968)

Le projet EKO a été conçu en 1959 par Oliviero Pigini, qui a créé les premiers prototypes de guitares acoustiques et semi-acoustiques inspirées des modèles siciliens traditionnels. Un an plus tard, en 1960, il a officiellement fondé EKO S.a.s. à Castelfidardo, en collaboration avec Giovanni Vignoni et Augusto Pierdominici. La philosophie de l'entreprise était de proposer une gamme complète d'instruments de musique produits selon des processus industriels standardisés, garantissant une qualité constante et un prix abordable. Le but était de rendre la guitare économiquement accessible à tous, y compris aux semi-professionnels, et de conquérir le marché des instruments d'entrée de gamme.

L'essor fulgurant d'EKO est indissociable du mouvement musical des années 1960. Avec l'avènement de groupes comme les Beatles et les Rolling Stones, la popularité du pop, du rock et du beat a explosé, un phénomène qui a fait la fortune de la marque en Italie. En réponse à cette demande croissante, EKO a réalisé un bond technologique et économique en se lançant dans la fabrication directe d'instruments électriques. La production de guitares électriques solid-body a commencé dès 1962, avec des modèles comme les séries 500, 600 et 700, dont la conception, inspirée de Fender, a défini le style italien de l'époque. La marque a également débuté la production de guitares semi-acoustiques et de basses, incluant la distinctive Violin Bass 995 avec sa tête en forme de volute.

La renommée d'EKO s'est étendue bien au-delà des frontières italiennes, notamment grâce à des collaborations stratégiques. Le partenariat avec la société de distribution américaine LoDuca Bros., formée en 1941, a été crucial pour l'exportation. Les frères LoDuca, importateurs d'accordéons italiens, ont agi en tant que concepteurs techniques pour EKO, fournissant des commentaires sur les designs, et sont devenus les distributeurs exclusifs de la marque aux États-Unis à partir de 1961. Cette relation a contribué à faire d'EKO le plus grand exportateur européen de guitares vers les États-Unis. De plus, EKO a fabriqué un grand nombre de guitares et d'organes pour d'autres marques, en particulier pour Vox, consolidant ainsi sa réputation et son savoir-faire. L'apogée de cette période, surnommée "Les années de la gloire", est visible dans le catalogue de 1967, où la gamme de produits était presque entièrement renouvelée.

Le Déclin et la Longue Traversée du Désert (1970-1985)

Le succès d'EKO a été brutalement mis à l'épreuve à la fin des années 1960 et au début des années 1970. Le décès d'Oliviero Pigini en 1967 a entraîné un ralentissement des projets de développement, même si l'entreprise a continué à produire pendant près de deux décennies. Le coup le plus dur est venu de l'intensification de la concurrence asiatique, dont les prix défiant toute concurrence ont rendu la production italienne de plus en plus difficile à rentabiliser. Pour tenter de survivre sur ce nouveau marché, EKO a adapté sa stratégie en produisant des copies des guitares américaines les plus célèbres. Des modèles comme la Kiwi, une Les Paul pour débutants, ou l'Indy, inspirée de la SG, témoignent de cette période de réorientation.

Malgré ces efforts, la situation est devenue insoutenable. L'entreprise a progressivement réduit le nombre de ses modèles et a fini par cesser définitivement son activité.

La Renaissance et le Positionnement Contemporain (Années 2000 à aujourd'hui)

Après une longue période d'inactivité, la marque EKO a connu un renouveau au début des années 2000 avec le lancement d'une ligne de produits intitulée « Eko's Back ». L'héritier du fondateur, Lamberto Pigini, a joué un rôle déterminant dans cette nouvelle phase, encouragent l'entreprise à relancer une production forte et renouvelée.

Cette renaissance s'accompagne d'un changement fondamental de modèle économique. Alors que la marque a jadis bâti son succès sur un modèle de production de masse et d'innovation en Italie, l'EKO contemporaine a adopté un modèle de fabrication mondialisé pour maximiser l'accessibilité et la compétitivité. Les instruments sont désormais produits dans plusieurs pays, principalement en Chine, mais aussi en République tchèque et en Espagne. Cette délocalisation de la production révèle un paradoxe central dans le modèle économique moderne d'EKO. L'identité de la marque est historiquement ancrée dans le concept de "Made in Italy", une caractéristique qui a marqué une époque. Cependant, pour son redémarrage, la marque a adopté le même modèle de production mondialisé qui, ironiquement, avait contribué à son déclin initial. En conséquence, l'appellation "Made in Italy" est aujourd'hui réservée à une poignée d'instruments premium, comme le modèle "INFINITO" lancé pour le 60ème anniversaire de la marque, transformant ainsi le concept de "Made in Italy" d'une identité de production de masse en un argument marketing de luxe et un hommage exclusif à son héritage. Ce repositionnement stratégique montre comment la marque a su s'adapter au marché actuel en tirant parti de son nom et de son riche passé tout en s'alignant sur les réalités économiques de la production d'instruments d'entrée de gamme.

La Basse EKO JB 100 3/4 Sunburst

La basse EKO JB 100 3/4 Sunburst fait partie de la série "100" d'EKO Guitars, une gamme spécifiquement conçue pour les musiciens, en particulier les débutants, qui souhaitent un instrument avec des caractéristiques similaires aux modèles ayant marqué l'histoire de la musique, mais à un excellent rapport qualité-prix.

La lutherie de cet instrument se veut à la fois classique et fonctionnelle. Son corps, de forme Eko VJB dans le style intemporel de la Jazz Bass, est fabriqué en peuplier. Ce choix de bois est courant dans les instruments d'entrée de gamme, car il est léger et abordable, ce qui contribue au confort du musicien, surtout lors de longues sessions de pratique. Le manche, en érable, est doté d'une finition satinée, un détail apprécié pour son toucher lisse et sa facilité de mouvement. La touche, comportant 21 frettes de type Medium Jumbo, est en laurier, un bois qui s'est imposé comme une alternative durable et esthétique au palissandre dans cette catégorie de prix.

La caractéristique la plus déterminante de la JB 100 3/4 est son diapason. Avec une longueur de 761 mm, elle se classe dans la catégorie des basses "short scale" ou "3/4". Cette dimension est la raison d'être de l'instrument, le rendant idéal "pour les jeunes et les enfants qui ont besoin d'une taille plus petite pour atteindre toutes les positions". Ce format est également une option pertinente pour les guitaristes qui souhaitent explorer la basse sans avoir à s'adapter aux dimensions plus grandes d'un instrument standard. La basse est équipée de deux micros à simple bobinage de type JB, contrôlés par deux boutons de volume séparés et un bouton de tonalité générale. L'accastillage est complété par un chevalet de style Jazz Bass et des mécaniques EKO Bass.

La configuration à double micro JB de la basse EKO JB 100 3/4 offre une grande polyvalence sonore, permettant d'explorer une large palette de sons. Le micro chevalet, avec ses propriétés de simple bobinage, délivre un son "nasal" et claquant. En revanche, le micro manche produit un son plus "chaud et enveloppant". L'utilisation simultanée des deux micros permet d'atteindre une "rondeur et une plénitude dans les basses fréquences" tout en conservant une "présence dans les médiums et des aigus cristallins". Cette capacité à passer d'un son percussif à des tonalités plus chaleureuses et rondes fait de l'instrument un excellent choix pour les musiciens débutants qui explorent différents genres musicaux.

La basse EKO JB 100 3/4 Sunburst se positionne de manière compétitive sur le marché des instruments pour débutants, avec un prix très abordable. Son concurrent direct le plus pertinent est la Squier Mini Precision Bass, un autre instrument de format réduit très populaire auprès des jeunes musiciens.

Le parcours de la marque EKO est un témoignage de la capacité d'une entreprise à évoluer et à s'adapter aux mutations du marché musical. De son âge d'or en tant que pionnier italien de la production de masse dans les années 1960, la marque a traversé une période de déclin face à une concurrence féroce pour finalement renaître avec un modèle économique globalisé. La basse EKO JB 100 3/4 Sunburst est une illustration parfaite de cette nouvelle ère. Elle ne porte peut-être plus le label "Made in Italy" de ses prédécesseurs, mais elle incarne l'esprit d'accessibilité et de qualité qui a fait la renommée de la marque à l'époque.

Ecouter le résumé audio de cet article

Caractéristiques :